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Papier carbone

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Papier carbone
8 février 2012

Jouvencelle

Comment est-ce possible
J’en suis tout esperluette
Ça mon ?…
Est-ce contribuable
Non vous assaisonnez
Quel âge ai-je
Devinez
Ça mon ?…
Incrédible
Tâtez mes lèvres
Ardues comme le Rubicon
Des heures sous le bigoudi
Du professeur Tal Dei Tali
Me replâtrer les artères
Les seins les hanches  les paupiettes
Sous la lorgnette
Traquer le cancre
Les poux dans la tondue
Les escarbilles
Ça mon ?…
Vous assaisonnez
Quel âge
Devinez
Allez
Quel âge ai-je
Ça mon fils ?
Non !
Ça non !
Un vieillard
C’est un vieillard
Donnez moi autre chose
Un bébé
Un bébé phoque
Un œuf de cane
Mais pas ça
Jamais
Au plus que parfait.

 

© Camille Pioz
     M. - 14 septembre 2012

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7 février 2012

Bébé est assise

Bébé est assise
Ses cheveux à ses joues
Ses cheveux moites
Bébé frissonne
Son pyjama mouillé
Ses draps mouillés
Ses draps chiffonnés
Bébé tâtonne
Son regard se dilate
Close la chambre
Noire la chambre
Noire  sur sa peau veloutée
Noire sur ses mains potelées
Noir
Le noir la happe
Bébé ne sait plus
Sa bouche est un large cri.

 

© Camille Pioz 
    G. - 7 février 2012

6 février 2012

Roses de rêverie

Je suis montée tout en haut de l'échelle
Pour redonner à mon rosier la douceur des tons pastels
J'ai pris mon  pinceau le plus souple celui en poils de loutre
J'ai appliqué sur les boutons sur les pétales sur le feuillage
Un baume léger
Un baume sucré
Un baume à la transparence pétillante
Je me suis approchée tout près de mon rosier
J'ai plongé mon visage au milieu du feuillage
Au milieu du feuillage j'ai trouvé un merle
Un merle au bec doré
Un merle pour me bécoter
Il m'a donné des baisers si doux si égers
Des baisers par kyrielle
Des baisers aux tons pastels
Que je suis restée tout en haut de l'échelle.

© Camille Pioz
     M. - 14 février 2011 

5 février 2012

anecdotiques à quoi cela rime-t-il enfantines

anecdotiques à quoi cela rime-t-il enfantines pages poétiques humeur vagabonde les cailloux poétiques pages blanches à quoi cela rime-t-il les cailloux enfantins humeur poétique pages vagabondes les cailloux anecdotiques vagabonds blancs à quoi cela tient-il humeur enfantine 

 

29 janvier 2012

Taille unique et belles dentelles (Nouvelle)

Elle s’est rasé les jambes, les aisselles, le  maillot de bain.

Elle a pris sa douche. Elle a tapoté l’oreiller, la couette sur le lit étroit, pour leur redonner un semblant de gonflant. Elle a ramassé les miettes sur la toile cirée, a rincé son bol et l’a posé retourné sur l’égouttoir en plastique.

Elle a enfilé son chandail noir à col roulé, une paire de collants épais avant de mettre son jeans, noir lui aussi.

Elle a  pris la grande enveloppe contenant cette lettre qu’elle a reçue la semaine dernière, et la petite boîte, simili cuir dessus, velours rouge dedans. Elle a pris son sac en toile et sa gamelle.

Sa voiture l’attend sur le trottoir d’en face. Le vent glacé la saisit en tenaille.

La route qu’elle parcourt depuis trente ans déroule son ruban sous le faisceau des phares ; elle est plus courte que jamais.

Le parking est désert. La voiture cahote dans les ornières. Décidemment, la suspension est à revoir, et le parking à refaire.

Elle contourne le grand bâtiment  de bêton. Elle escalade la grosse caisse en bois et se faufile par la lucarne qu’elle a laissée entr’ouverte hier soir. Elle se reçoit à croupetons sur le carrelage. Les toilettes sentent le désinfectant. Ses pas résonnent étrangement dans le vide. Encore un couloir, et la voici dans l’atelier où les tables de travail s’alignent,  bien ordonnées, aussi sagement que les pupitres d’une immense salle de classe.

Elle se dirige vers la cinquième rangée, deuxième colonne et s’installe comme aux jours ouvrés devant sa machine. Ses gestes se dévident sans y penser : allumer sa lampe de travail, ouvrir son tiroir, prendre les ciseaux, choisir le bon bobineau, charger la canette. Puis presser la pédale du pied droit. Sous les lumières blafardes, la machine lance un murmure rauque et prolongé.

La journée sera longue. Elle a calculé qu’il lui faudrait réaliser vingt-six bonnets. Elle a soigneusement choisi ses modèles, en fine soie brodée, ses préférés ; elle les ourlera de dentelle de Calais.

 

Concentrée à guider le tissu sous l’aiguille qui monte et descend à un rythme cadencé, elle n’a pas vu la nuit revenir tout engloutir. Malgré le froid, la sueur lui coule le long des tempes. Elle a encore cinq bonnets à confectionner. La nuque raide, les yeux brouillés, elle s’autorise une nouvelle pause. Elle regarde autour d’elle toutes ces machines en uniforme sous leur housse de  plastique noir.

Pour se dérouiller les jambes, elle va jusqu’au cagibi de Germain, qui a charge de tout dépanner, en regarde le contenu. C’est bien rempli là-dedans, une vraie caverne d’Ali Baba. Au retour, elle s’attarde entre les tables : ici, c’est celle de Chantal, plus loin la table de Catherine, là celle de Murielle …

Elle se remet au travail. Méticuleusement.

Les vingt-six bonnets terminés, il lui faut les assembler. Tous, bout à bout. Elle les relie avec trois rubans de dentelle qu’elle entrelace, c’est plus sûr et plus coquet.

C’est réussi. C’est de la belle ouvrage. Elle est fière de sa réalisation. Pour une fois qu’elle a pu travailler à son idée, prendre le temps de fignoler, sans les gueulements de la contre-maîtresse qui arpente les rangs armée d’un chronomètre : « allez, allez, les filles, faut y aller, on mollit pas ! ».

Maintenant, elle sort la lettre de son sac, celle de la semaine dernière, la découpe. Deux coquillages s’y dessinent. Elle s’affaire avec le papier et la dentelle. De la petite boîte noire, elle détache le disque de métal doré ; elle remplace le ruban tricolore par cette même dentelle délicate.

Elle a éteint sa machine, l’a recouverte de sa housse noire. Elle a balayé les bouts de fil,  les chutes de tissu, de papier, de dentelle. Elle a remis ciseaux, aiguilles, canettes à leur place dans le tiroir. Son sac, sa gamelle sous le tabouret.

Elle s’est déshabillée. Complètement. La chair de poule grêle sa peau claire. Elle a plié ses vêtements, les a posés sur le tabouret.

Elle a installé l’échelle double de Germain, a pris son ouvrage. Tout est prêt.

 

Quand les filles sont arrivées, lundi matin, elles allaient commencer leur sixième semaine d’occupation. En espérant que les médias parlent au moins un peu de leur désespoir. Et voilà qu’elles trouvent la copine toute nue ou presque, la langue violette, les pieds à cinquante centimètres du sol.

Les machines, leurs machines, vont leur être enlevées et mises entre les mains d’autres ouvrières de l’autre bout du monde.

Et maintenant il y a la Jeanine suspendue dans l’air comme un grand point d’exclamation.

Une ribambelle de soutien-gorge la tient attachée à la grande poutre centrale. Les filles reconnaissent le modèle de luxe  à son voluptueux papillon pigeonnant: « Azuré bleu céleste ». Le plus prisé, le plus raffiné, celui qui a couronné les succès de la marque.

Elle est tout auréolée de dentelle la Jeanine.  Et cela lui va  si bien ce bleu tendre.

 

Son soutien- gorge, à elle,  est en papier.

Sur son sein droit, l’emblème tricolore de la République.

Sur son sein gauche, une date : vendredi 13 janvier 2012.

Reliant les deux bonnets, une bande où s’inscrit une phrase. En s’approchant tout près, tout près, on pourrait déchiffrer les lettres gracieuses qui s’élancent en italique : « Cette distinction, Madame, honore votre engagement professionnel ».

Sur sa toison un disque de métal, un petit disque doré, maintenu par des rubans qui enlacent ses hanches façon string, les mêmes  rubans de dentelle  que ceux qui enserrent son cou.

Médaille du travail, échelon Vermeil, pour saluer trente ans de bons et loyaux services.

 

 

  © Camille Pioz                                                                    
      G. -  29 janvier 2012

 


 

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